Il est possible pour un employeur de faire sanctionner un médecin du travail complaisant à l’égard d’un salarié

Publié le : 05/10/2017 05 octobre oct. 10 2017

Pour la première fois la jurisprudence a sanctionné un Médecin du travail qui avait conscience de l’irrégularité du certificat médical d’inaptitude rédigé dans les intérêts du salarié.

En effet, dans le cadre d’une absence pour maladie professionnelle, d’un congé maternité, d’une absence d’au moins 30 jours pour cause de maladie ou d’accident non professionnels ou en cas d’accident du travail avec une absence d’au moins 30 jours, une visité médicale de reprise auprès du Médecin du travail est obligatoire.

En principe, c’est l’employeur qui doit prendre l’initiative de la visite médicale de reprise quand les conditions citées ci-dessus sont réunies. Il n’est néanmoins pas exclut que le salarié puisse solliciter cette visite de reprise directement auprès de la médecine du travail.

La visite de reprise permet au Médecin du travail, de délivrer au salarié l’avis d’aptitude médicale à reprendre son poste, de préconiser si nécessaire l’aménagement, l’adaptation du poste ou le reclassement du salarié et d’examiner, éventuellement les propositions d’aménagement, d’adaptation du poste ou de reclassement faites par l’employeur à la suite des préconisations émises par le Médecin du travail.

Le Médecin du travail peut prescrire des examens complémentaires, notamment pour déceler des risques sur la santé du salarié.

Un employeur reprochait à un médecin du travail, d’avoir rédiger un certificat d’inaptitude définitive pour un salarié avec complaisance sans avoir respecté les obligations qui s’imposent à lui, à savoir une analyse précise du poste de travail et des échanges préalables avec l’employeur sur la possibilité d’adapter le poste du salarié.

Pour l’employeur, le Médecin du travail avait rédigé un certificat médical d’inaptitude définitive en connivence avec le salarié.

Dans un premier temps l’employeur a saisi la Chambre Disciplinaire de première Instance d’Ile de France de l’ordre des Médecins par le biais d’une plainte, afin de contester l’attitude du Médecin.

Suite à une instruction de la plainte, cette dernière a été rejetée par une décision en date du 23 novembre 2012 par la Chambre Disciplinaire de première instance.

L’employeur a fait appel de cette décision devant la Chambre Disciplinaire Nationale de l’ordre des Médecins, cette dernière a annulé la décision rendue le 23 novembre 2012 et a prononcé un blâme à l’encontre du Médecin considéré comme fautif.

Le Médecin du travail s’est pourvu en cassation devant le Conseil d’État contre cette décision de la Chambre Disciplinaire arguant qu’il n’avait pas eu d’attitude tendancieuse au moment de la rédaction de l’avis d’inaptitude.

Le Médecin du travail a reconnu devant le Conseil d’Etat que, « lorsqu’il a établi le certificat d’inaptitude lors de la visite de reprise de travail du 31 août 2011, il était conscient de l’irrégularité de ce certificat, dès lors que l’intéressée n’avait pas repris son travail mais qu’il s’était senti obligé de le rédiger en raison de la réaction du salarié déclarant que, faute de ce certificat, il ne lui restait qu’à se suicider ».

Le Médecin du travail a également ajouté avoir établi ultérieurement des certificats d’inaptitude à partir des seuls dires du salarié, sans analyse précise du poste de travail ni échange préalable avec l’employeur.

Le Conseil d’État a jugé ainsi que le Médecin du travail avait manqué à ses obligations déontologiques, la Chambre Disciplinaire nationale, qui a suffisamment motivé sa décision, a exactement qualifié les faits qui lui étaient soumis.

Ainsi, le blâme adressé au Médecin du travail a été confirmé par le Conseil d’État qui vient pour la première fois sanctionner un Médecin du travail sur une plainte préalable de l’employeur soupçonnant un avis de complaisance.

Il ressort clairement de cette jurisprudence que le Médecin du travail lors des visites de reprises doit respecter ses obligations à savoir analyser précisément le poste de travail du salarié et échanger avec l’employeur sur les possibilités d’adapter le poste. En l’absence de ces éléments, l’employeur pourra faire sanctionner le Médecin du travail.

CE 10 février 2016, n° 384299

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